L’obligation de négocier avant la décision unilatérale de l’employeur

Par un arrêt du 13 janvier 2021 (n° 19-23.533), la chambre sociale de la Cour de cassation a réitéré, sur la question de l’articulation entre négociation collective et décision unilatérale de l’employeur, une position salutaire pour l’avenir du dialogue social.

Cette dernière était tenue d’interpréter les dispositions de l’article R.2314-5 alinéa 2 du Code du travail, selon lequel « la possibilité de recourir à un vote électronique est ouverte par un accord d’entreprise ou par un accord de groupe. A défaut d’accord, l’employeur peut décider de ce recours ». 

En l’espèce, en l’absence de délégués syndicaux dans son entreprise, un employeur décidait de ne pas négocier d’accord collectif et recourait unilatéralement au vote électronique lors des élections des membres du comité social et économique. 

Un syndicat de l’entreprise demandait l’annulation de cette décision au motif que l’employeur aurait dû, en l’absence de délégués syndicaux, négocier un accord collectif avec les négociateurs de substitution prévus dans un tel cas : salariés mandatés par une organisation syndicale représentative et/ou membres titulaires de la délégation du personnel (Articles L.2232-23 à L.2232-26 du code du travail).

La Cour de cassation rejetait le moyen et le pourvoi du syndicat. Elle profitait toutefois de cette affaire pour préciser la teneur de la notion « à défaut d’accord », présente dans bon nombre d’articles du code du travail (en matière de droit à la déconnexion, de mise en place du télétravail ou du repos compensateur, etc.). La Cour confirmait sa position tenue en matière de détermination unilatérale d’établissements distincts1 :

En présence de délégués syndicaux dans l’entreprise, la priorité doit être donnée à la négociation d’un accord collectif, de sorte que ce n’est qu’en cas d’échec de celle-ci que l’employeur peut agir unilatéralement.

L’arrêt de rejet rendu par la Cour de cassation ne permet malheureusement pas de connaître les conséquences du non-respect d’une telle obligation.

Il est toutefois possible d’affirmer qu’en présence de délégués syndicaux au sein de l’entreprise, une mesure prise unilatéralement par l’employeur sans négociation préalable pourra faire l’objet d’une de demande de suspension, en référé, ainsi que d’une annulation, au fond.

En tout état de cause, la primauté donnée à la négociation d’entreprise permet aux organisations syndicales d’exiger de l’employeur qu’il engage une négociation loyale, préalable à toute décision unilatérale.

1 Cass. soc., 17 avril 2019, n°18-22.948.